Rien n’est ici comme ailleurs. Autrefois des géants, dit-on, auraient mis montagne sur montagne pour escalader le ciel ! La force âpre de la grande Maurienne nous saisit chaque fois à travers ces paysages, ces bourgs serrés, ces hameaux accrochés aux versants et bâtis de courage. Il faut se battre pour tout, contre la neige et les glaces, contre le froid qui gèle les récoltes, contre l’inondation qui arrache le sol et emporte les maisons. Les cartes postales déroulent la litanie aux sonorités familières, Bessans, Bonneval, Bramans, Lanslebourg, Lanslevillard, Termignon, Villarodin… Les noms demeurent, et leur permanence dément l’effet du temps, la disparition de ce XIXe siècle tardif qui s’est jusqu’au seuil de la seconde guerre mondiale. La mémoire superpose la double image d’autrefois -et d’aujourd’hui, mais, en nous offrant sa collection rassemblée, Françoise Cimaz ne fait pas qu’éveiller les nostalgies. Elle donne les clés, elle délivre un voir sensible et complexe d’expériences quotidiennes traversées par l’histoire et son devenir. On prend, bien sûr, la mesure inquiète de ce qui subsiste encore au regard de tout de qui a disparu. On découvre aussi la trace de l’événement, l’irruption du nouveau dans ce monde de tradition si fidèle aux valeurs ancestrales.