L’Isère – Sylvie Fabre G. – 1999

Elle a lu des livres puis elle les a oubliés. Elle a regardé des photographies puis elle les a rangées. Elle a marché souvent, longtemps, au noir des forêts, au vert des lacs, au blanc des montagnes. Puis elle a effacé ses pas. Elle a appelé son enfance. Elle a appelé cette petite enfance qui accourt toujours quand on l’appelle, elle a regardé son enfance à elle dans les rues de ces villes, sous la voûte de ces forêts. Puis elle a laissé son enfance s’éloigner, éteindre en s’éloignant toutes les images allumées, une à une. Elle était dans le noir quand elle a commencé à écrire. On ne peut bien écrire que dans le noir. Plus de livres, plus de promenades, plus de mémoire. Plus rien que la clarté d’une première phrase, la petite enfance d’une première phrase, la forêt d’une première phrase. Qu’est-ce que tu fais ? Tu écris un livre sur ta région, tu parles de l’Isère ? Non, je n’écris pas un livre sur ma région. Je fais un nid pour la beauté, pour le silence blanc et la neige bleue. Je bâtis une maison grande comme un livre pour les vagabonds, les sédentaires, les paysans, les citadins. Christian BOBIN.

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