” Joseph Servan a au moins transmis une idée d’autant plus révolutionnaire qu’elle anticipe de près de 10 ans sur la Révolution : c’est celle du ” Soldat Citoyen “, titre de son ouvrage publié en 1780. Sans être le seul à avoir affronté le problème, il est de ceux qui ont creusé et retourné avec le plus d’obstination la question de savoir comment rendre le soldat éventuellement heureux, mais surtout efficace, instruit, productif et non seulement de mort, mais d’un apport constructif à la société. Et la nouveauté majeure anticipatrice, c’est de l’avoir rêvé citoyen, non plus un paria, mais un élément intégré pleinement au corps social. Certes, il y a la manière : le souvenir des soldats colons de l’antiquité romaine, en même temps que celle de l’encasernement, la participation aux travaux collectifs… Servan propose, et somme toute hésite, hostile au mercenariat, mais sachant les résistances (elles se manifestent dès qu’en 1790 l’idée est lancée) que suscitera la seule vraie promotion citoyenne du soldat : le service de tous pour la patrie. Mais cela, il fallait l’expérience héroïque de la guerre pour le faire pleinement découvrir. Par sa pensée, ses anticipations, son action, hésitante parfois, décisive en certaines circonstances, le Général Servan mérite de sortir de l’anonymat dont la perte de la mémoire collective tend à envelopper les acteurs de la grande aventure révolutionnaire. Remercions Monsieur Jacques-François Lanier de vous l’avoir fait redécouvrir, avec précision, conviction, et une érudition qui n’enlève rien à l’intérêt que nous portons à son personnage. ” Michel Vovelle.